La loi des séries

Y'a des jours comme ça, on croirait que les patients se sont donné le mot. "Allez aujourd'hui, on arrive tous en retard, ça va sûrement la faire rigoler la remplaçante!"

Ou pas...

Par exemple, tout récemment. Le même jour, sur trois créneaux horaires consécutifs, trois patients avec à peu près le même profil : homme 40-45 ans, antécédent de séjours en psychiatrie, traitement psychotrope plus ou moins lourd, consommation d'alcool excessive...

Le premier a été amené par sa mère, il était malheureux parce que sa copine l'avait quitté,  tentait (de son propre aveu!) de se suicider à petit feu en arrêtant ses antihypertenseurs et anti-agrégants (il avait aussi un antécédent d'AVC) et voulait que les flics lui ramènent sa copine. Et sa mère d'essayer de m'aider "Allez Johny - oui, avec un seul N - moi quand ton père m'a quittée avec 9 enfants sur les bras je me suis pas morfondue comme ça".

Le deuxième venait faire retirer des points de suture sur le dos de la main ; il avait passé le poing dans une baie vitrée, "parce que c'était ça ou la figure du type". Il était visiblement ivre, et complètement euphorique. Jamais je n'aurais cru que c'était si drôle de se faire découdre.

Le troisième est arrivé avec le nez complètement de travers et une grosse plaie sur le front. Il avait perdu connaissance sans signe avant-coureur et s'était explosé la tête sur sa table basse. Quatre jours plus tôt. Et n'avait rien fait d'autre que de vaguement éponger le sang. Lui je l'ai quand même envoyé voir le cardio, parce que, alcool ou pas, une syncope "à l'emporte-pièce" ça mérite un minimum qu'on s'y intéresse.

A ce stade j'étais prête à croire à la blague cosmique.

Et j'ai (presque) été soulagée quand le suivant m'a fait le coup classique du "J'ai pris rendez-vous pour un rhume, mais là ça va mieux ."

Mais quand même, 9 ans de formation médicale pour ça, pfffou, quoi. Un peu. Non?